La pandémie de Covid-19 a eu de lourdes conséquences sur l’organisation des espaces de travail. Après la mise en place de solutions à court terme, de nouveaux modes de travail imposés de manière rapide et une « improvisation » dans l’organisation globale, il est temps de voir plus loin. Cette crise sanitaire que nous traversons peut aboutir à des changements dans la conception des espaces à plus long terme, en plaçant l’hygiène au cœur des priorités du lieu de travail. Tour d’horizon des solutions concrètes et des nouveaux enjeux qui vont guider la création des espaces de bureaux demain.
Demain, des bureaux dignes d’un hôpital ?
En l’absence de vaccin, les lieux de travail actuels sont « adaptés » et repensés pour que les employés puissent en avoir une utilisation en toute sécurité. Mais avec des contraintes fortes. Espacement des bureaux, sens de circulation, condamnations de zones ou encore réduction des accès, il faut composer avec de nouvelles règles dans des espaces inadaptés à cette rigueur. Alors, la situation actuelle se résume à une dualité : on applique des solutions à court terme visant à renforcer la confiance des salariés et à réduire le nombre de personnes présentes dans les bureaux. En parallèle, il est nécessaire déjà d’apporter des améliorations voire des modifications plus fortes en visant à plus long terme.
Justement, cette vision à long terme, à quoi peut-elle ressembler ? Certains prédisent que la présence accrue de maladies contagieuses pourrait donner naissance à un nouveau type de bureaux : un bureau qui a des éléments en commun avec un hôpital. Non, votre bureau ne va pas devenir un bloc opératoire. Mais certains principes qui guident la conception des bâtiments médicaux pourraient être appliqués au bureau.
L’importance du choix de materieux
L’un des principes directeurs est par exemple le choix des matériaux. Il est important de choisir des matières pouvant résister à un nettoyage intensif à l’aide de produits désinfectants. Voilà comment les surfaces poreuses comme le bois naturel seront à l’avenir peut être moins présentes, au bénéfice de la pierre ou des revêtements stratifiés. Des éléments de décoration teints dans la masse avec un support imperméable à l’humidité qui peuvent résister à un nettoyage intensif devraient aussi se généraliser. Des matériaux plus durables qui ne sont pas nécessairement plus coûteux.
« La différence de prix entre les matériaux n’est pas la clé. Ce qui va changer demain, c’est la nécessaire implication pour choisir les matériaux. Il faudra effectuer un choix conscient en intégrant les contraintes d’hygiène » explique Héloïse de Saint-Romain, Responsable mobilier chez Cléram
Nouvelles approches pour faciliter le déplacement
Autre élément qui n’est aujourd’hui pas au cœur des débats mais pourrait émerger comme une préoccupation centrale, le traitement de l’air. Des systèmes de filtration de l’air qui utilisent la lumière ultraviolette pourraient se généraliser pour un nettoyage complet et un air toujours plus propre.
« On peut également s’attendre à une évolution des mentalités et voir des locataires exigeants davantage de leurs propriétaires en termes d’entretien et de suivi de nettoyage. D’ailleurs, se laver les mains au gel hydroalcoolique avant de se rendre à son bureau ou à chaque fois que l’on passe d’un espace à l’autre pourrait devenir un nouveau rituel » poursuit Pascal Poussereau, Directeur du pôle travaux chez Cléram
Comme le font les médecins dans un hôpital, les salariés pourraient aussi avoir un sens de circulation, des chemins pour se rendre rapidement d’un point A à un point B. On peut imaginer que cette approche sera aussi très importante demain en entreprise en facilitant le déplacement et en chassant les mouvements inutiles.
Des bâtiments connectés pour une meilleure santé
Et si le bureau de demain était un bureau « sans contact » ? Grâce au développement des services connectés, certains gestes ordinaires pourraient disparaître. C’est le cas par exemple de la simple pression sur le bouton qui appelle l’ascenseur. Un geste anodin qui, pourtant, peut briser toutes les précautions sanitaires prises au sein d’un bureau. On peut imaginer que la commande de l’ascenseur se fasse par smartphone, tout comme il pourrait être possible de déclencher la réalisation d’un café en salle de pause.
Les tendances futuristes pour les espaces de bureaux
Mieux, les salles de conférence pourraient être équipées de technologies à commande vocale pour contrôler l’éclairage et les différents appareils présents (vidéoprojecteur, caméra, etc.). Passer les portes ou tirer la chasse d’eau aussi pourrait se faire d’un simple geste face à un détecteur de mouvement. De bonnes idées, mais certains experts voient aussi dans le développement de la connectivité au bureau un vrai risque de perte de la vie privée au travail. En effet, une surveillance accrue de l’état de santé des salariés tendrait à se développer en parallèle : imaginez des capteurs de température placés dans les bureaux pour vous surveiller. En cas de fièvre, l’accès pourrait vous être refusé…
Attention, ces systèmes ne sont pas encore déployés et leur arrivée n’est pas pour demain. Le sujet de la protection de la vie privée est capital et les services juridiques comme ressources humaines doivent s’emparer de la thématique dès aujourd’hui.
On le perçoit tant avec la montée en puissance des services connectés qu’avec la prise de conscience sanitaire. La définition des espaces de bureaux de demain se fera de manière progressive. Il n’existe pas un format d’aménagement ou un type d’espace qui puisse être répliqué de manière globale pour répondre aux besoins nouveaux des entreprises. L’approche doit se faire de manière personnalisée et fine, en intégrant notamment les attentes du personnel.
Le bureau, ce lieu vivant ouvert sur le monde appelé à se réinventer
Certains salariés sont-ils prêts à adopter un fonctionnement par équipe et à se rendre au bureau certains jours de la semaine puis à travailler depuis leur domicile le reste du temps ? Est-il pertinent d’avoir des salariés en télétravail intégral et d’autres présents dans les locaux en permanence ? Ces questions, les ressources humaines vont devoir les poser et définir un nouveau mode d’organisation.
Selon les réponses glanées, ce n’est pas seulement l’espace de bureau qui va être impacté. C’est aussi le choix du lieu d’implantation d’un siège social ou d’une agence qui va revêtir une importance capitale. Car dans ce monde du « Coronavirus », l’entreprise est plus que jamais dépendante de son environnement direct. Si de nombreux collaborateurs se rendent au bureau en utilisant les transports publics, il pourra demain être de la responsabilité de l’entreprise d’offrir des services sur mesure afin de réduire le risque d’exposition aux maladies lors des trajets entre le domicile et le lieu de travail. Comment ? Avec un service de navette propre au personnel, des places de parking sécurisées (ou des places supplémentaires) ou des lieux de stockage de vélos.
Avant la pandémie, les bureaux étaient considérés comme essentiels à la productivité et au développement de la culture d’entreprise. Une concurrence intense pour obtenir des espaces de bureaux de premier choix dans les grands centres urbains existe, et une course à la densification ou à la rationalisation des bureaux donne le tempo. Cette époque est révolue. Les entreprises les plus audacieuses vont remettre en question leur manière d’appréhender les espaces de bureaux.
(domicile-bureau) après le coronavirus
Une approche progressive d’adaptation
- Il va falloir reconstruire et repenser la manière dont le travail se réalise au sein d’une organisation. De nouvelles pratiques sont à inventer en utilisant ce qui a bien fonctionné pendant le confinement et en dopant la présence du numérique au sein des process.
- En matière de recrutement, un vrai changement est à attendre grâce à l’évolution des espaces de bureau. La recherche de « talents » pourrait devenir plus facile, car le réservoir de candidats disponibles va devenir plus grand, si l’entreprise impose moins de contraintes géographiques. Si le télétravail devient la norme ou que des missions peuvent se réaliser de manière hybride (domicile / bureau), certains candidats pourraient y être sensibles.
- Des modèles de collaboration basés sur la technologie et le développement du travail asynchrone vont émerger. Ce qui nous paraissaient hier comme futuriste va rapidement devenir une pratique courante.
- La transformation à venir va reposer sur un portefeuille de solutions spatiales : espaces dont l’entreprise est propriétaire, location avec des baux standards, location avec des baux flexibles, espaces de coworking et travail à distance. Le loyer, les coûts d’investissement, l’exploitation des bâtiments et leur entretien font de l’immobilier le poste de dépense le plus important pour de nombreuses entreprises(hors rémunération). La nouvelle approche diversifiée va permettre de chasser les coûts et de retrouver une certaine souplesse financière sur ce point.
Des espaces de bureaux repensés pour repondre aux nouvelles moeurs
Même lorsqu’un traitement du Covid-19 deviendra disponible, il semble probable que l’expérience de la pandémie que nous vivons tous aura un impact durable sur notre façon de travailler et sur le fonctionnement des espaces de bureaux.
« L’idée de venir travailler alors que l’on est malade pourrait devenir socialement inacceptable. L’accent mis sur la santé et l’hygiène est si fort qu’il donne un nouveau sens à l’idée de travailler dans un environnement sûr et propre. Sur le plan sanitaire, le coronavirus a largement bouleversé notre perception de la sécurité au travail » conclu Thierry Zimmer, CEO chez Cléram.